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Ces choses qui vivent en nous

12 novembre 2007

"Insensés, nous sommes sur le point de nous offrir au prédateur..."

Ces choses qui vivent en nous - Partie quatre.

[Lire la première partie]
[Lire la seconde partie]
[Lire la troisième partie]

*

- Suis-moi. Ici, nous sommes trop à l’abri. » Dans le ventre. Couloir délétère. Des ombres. La nuit avance à reculons. Des éclats sonores, dissonants, et une porte verrouillée. Un sol de clés. « Regarde, c’est ici que ça se cache. Dans ce couloir, le temps est instable. Tout est agressif, ici. Ce n’est plus Nous dans l’espace, c’est Nous dans le monde. Il faut le traverser, ce monde, il faut le vivre. Tu as compris. On essaie, on y arrive. Viens.
 
         
- Je... J'ai peur.

- Comme un amour qui vient de naître. Viens, allez, viens. La peur, c’est juste un vilain ver de terre qui se ratatine sur lui-même et se propulse contre tes côtes ou le long de ta trachée. C’est une chose qui vit en toi. Viens, chérie, viens. On va devenir forts. On va devenir beaux.  On va devenir Nous.

          - C'est ça, la morale de l'histoire ? "Faites face à vos peurs, et elles disparaîtront" ? Il ne s'agit plus d'un jeu de mots entre toi et moi. Insensés, nous sommes sur le point de nous offrir au prédateur, lombric à dents longues. Il... Est-ce que tu l'entends ?! Chéri, je suis terrorisée. J'ai la couardise en horreur, mais mon courage s’égare dans les sens interdits. Je ne fuirai pas. Seulement... Par pitié, ne me laisse pas toute seule.  

          - Prends mes lèvres. »  C’est la jolie musique. De l’insistance naît l’agressive harmonie, la distance agonise. « Crois en moi. » Ils tremblent. « Toi en moi. » Alors ce sont les soupirs, le tissu qui se froisse. La pression des caresses, la chaleur qui escalade la peau diaphane. Une porte s’ouvre. « C’est là. »  Evidence. Eminence. Existence. Douleur, extase, le corps hésite un instant. « Après nous. » Comme le terrible fracas d’une vie qui se meurt. Le couperet s’abat, la chose est dite. Et ensemble : « Je t'aime » 

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12 novembre 2007

"Est-ce que tu crois qu'il faut la calmer ? - Non. Il faut la détruire."


Ces choses qui vivent en nous - Partie trois.

[Lire la première partie]
[Lire la seconde partie]

*

- La géhenne, enrobée de tes tendresses. Tu me rends nerveuse. J'écrase tes doigts, tu me broies le coeur. Voilà donc ce que tu en fais ? Tu te dérobes, mais c'est moi que tu dois voler, tu entends ? Non, tu ne m'écoutes même pas. Très cher amour. Il n'y a pas de raison, et il n'y a pas de temps. Il y a nous, le monde dévasté, cet air étouffant, et un mur himalayen. Toi, mon Pyrame, moi, ta Thisbé. Cette fissure à la jonction de nos mains est le fruit d'un terrible imbroglio. Comme si nous avions passé l'éternité à nous courir après sans jamais réduire la distance qui nous sépare. Nous sommes fous l'un de l'autre, et fous tout court, assurément. Ca devrait suffire. Pourquoi n'y arrive-t-on jamais ?

- On essaie, on y arrive.

 
- La jolie musique... Puisque tu le veux bien, tendre amant, je ne résiste pas. Vaste partition immaculée, j'absorbe l'encre de tes mots ; sous ma langue fondent les notes veloutées que tu traces du bout des lèvres. Dansons-les à la Lune sur les touches d'un piano.

 - Un jour, tu me reprocheras de faire de la prose. Tu prendras encore ça pour de l’inaction. Ce jour-là, je te parlerai de la beauté de tes mots, et de leur pouvoir d’infusion. Notre musique, je la compose en Toi. Je la joue, je l’interprète. « Nous » est le chef d’orchestre. Et c’est bien connu : quand le soliste est amoureux, il n’a plus besoin de partition. Est-ce qu’on peut calmer cette chose, avec notre musique ? Est-ce que tu crois qu’il faut la calmer ?
            
       
- Non. Il faut la détruire. Son irritation croît quand Nous prend de l'ampleur. Autrement dit, elle grandit rapidement. La chose semble mal supporter l'harmonie ; elle se délecte de nos tensions, et nos réconciliations la débectent. Alors notre musique, la calmer ? Au contraire. Elle l'anime, elle la frustre, elle la brûle. Fidèle à son outrecuidance, elle n'ose se manifester. Face à son silence, on la croit disparue, ou absente, on laisse échapper un soupir de soulagement. Pourtant, son regard insidieux, incisif est une épée de Damoclès en érection, fièrement dressée dans notre cage thoracique : elle guette le moindre écart de notre vigilance pour refaire surface, trésor. Oui, il faut la détruire. Et je sais comment. Nous doit atteindre l'ultime, le point culminant. Pour l'éradiquer, Nous doit atteindre l'orgasme. 

29 août 2007

"Nous ne partirons pas ensemble. Pas avec tes doutes."



[Ici, il faut mettre une image. Et trouver quelque chose de moins banal que "Partie deux/Partie 2/Deuxième partie" and co.
Finalement, comme tu l'as constaté, on peut mettre les posts dans l'ordre qu'on voulait. Je propose qu'on garde le coup des rubriques, mais du coup, le lien vers les autres parties dans le corps de l'article n'est plus vraiment nécessaire.]


Ces choses qui vivent en nous - Partie deux.

[Lire la première partie]


*


-    Encore, cette phrase. Pourquoi est-ce toujours à moi d'être raisonnable pour deux ? Ne le sais-tu pas encore ? Il ne suffit pas de le dire, mon très cher virtuose du verbiage. Nous voici là, depuis la nuit des temps, et seules tes lèvres bougent. J'ai honte de me l'avouer, mais parfois, la lassitude s'empare de moi ; tu devrais remplir ce rôle à sa place... Ah, je soupire encore. Après tout, je suis sans doute celle qui fait le plus de fausses notes. Parce que j'ai peur, moi aussi, tu comprends ? J'ai peur, chaque fois que je m'en vais. Peur que tu ne remarques pas mon départ, peur que tu fixes l'horizon, comme à ton habitude, et que tu oublies que j'ai encore fermé les yeux. Dans ces moments-là, mes voyages sont vides de toi. Doux paradoxe. Alors que tu restes mon unique préoccupation, une obsession paralysante, tu ne m'apparais jamais en rêve. Un jour, tu m'emmèneras vraiment, promets-le moi. Il y a cette voix au fond de mon estomac, qui m'empêche de te révéler les lueurs de mon amour incandescent, qui me fait croire que tu n'existes pas, plus, trop, pas assez. Elle me dicte des horreurs qui me brûlent les lèvres. Un jour, emmène-moi. Je n'aurai pas de bagage, je ne veux rien, rien d'autre que toi. Je vais vraiment devenir cinglée, ici, à t'écouter m'aimer, et à douter de mes réponses. Emmène-moi avant que je ne m'enfuie, je t'en prie, je t'en prie, partons, je t'en prie.

-    Raisonnable ? Tu ne l’as jamais été, chérie. Regarde-moi : Tu vois, au fond de mes yeux ? Est-ce que c’est raisonnable, ça ? Nous sommes là depuis la nuit des temps, dis-tu. Dans ce cas. « Depuis la nuit des temps », tu es cette force qui gravite autour de moi et qui me fait défaut, cette force qui me manque pour affronter le temps, et qui seule, pourtant, me fait tenir. Tu veux partir ? Mais toi, combien de siècles as-tu mis avant d’arriver ? Combien de siècles contemplatifs, cassés, oisifs, inutiles, perdus ? Combien ? Alors oui, je parle. J’ai tellement de choses à te dire. Je ne te prendrai pas avec moi, nous ne partirons pas ensemble. Pas avec tes doutes. Pas avec nos peurs. Avant, je veux t’étouffer avec des mots, écraser ta tristesse, dessiner ton sourire, répondre à tes questions. Te faire perdre la tête, car c’est le prix de la mienne. Tu as « la chose », toi aussi. Essaie de lâcher ma main. Allez, essaie. Là, tu as vu ?


29 août 2007

"Il y avait autre chose dans ce corps"

Ces choses qui vivent en nous - Partie un.

*


Trop petit, trop grand, on ne sait jamais. Prisonnier, toujours. Deux âmes conversent. Dans la tiédeur du soir,  la terrasse a des allures de chambre d’hôpital.

«    J’ai été malade, un jour. Physiquement, j’entends. Une sorte de grippe, pas grand-chose, en somme. Ca m’a tout de même cloué au lit deux bonnes semaines. Ca m’a rendu... malade, tu sais. J’avais l’impression de sentir la chose progresser en moi. Les jours passaient, et elle s’insinuait partout. Au bout d’une semaine, j’étais comme dépossédé de mon propre corps. Mais forcé de vivre avec quand même, tu comprends ? Mon enveloppe charnelle avait désormais deux hôtes : la maladie, et moi. La vérité, c’est que j’ai vite compris qu’il y avait autre chose dans ce corps. Quelque chose qui ne grandissait pas. Quelque chose qui ne se développait pas. Quelque chose qui pourrissait.

-    ...En a-t-on déjà parlé ? C'est étrange, la situation que tu décris fait écho à l'un de mes souvenirs. Pourtant, je n'ai jamais été souffrante – un peu comme cette pauvre femme qui m'a enfantée ; elle certifiait sans cesse avoir une santé de fer, avant d'être emportée par l'une de ces infirmités imprononçables. La première, et la dernière. Tout ça pour dire que je sais. Réminiscence inexpliquée : je sais sans savoir, comme une pensée qu'on n'arrive pas à saisir mais qui est là, latente, menaçante presque. Dis. Cette chose. Maintenant que tu es guéri, est-ce que tu la sens encore ?

-    Parfois, oui. C’est un peu comme une dépendance, tu sais. Tu passes outre les migraines, les nausées, les crises d’angoisse, et tu crois que ce truc est terrassé. En réalité, c’est toujours là, mais ça s’est recroquevillé quelque part. C’est... comme la peur. Celle qui s’accroche et fait corps avec le courage. Alors oui, de temps en temps, je la sens encore. De temps en temps, j’ai un peu peur. Ca ne dure jamais, et ça arrive seulement quand tu n’es pas là. Alors je prends sur moi, je prends sur nous, et ça passe.

-    Oh. La plus délicieuse des solutions de facilité. Et une énième déclinaison de cette « dépendance » dont tu parles.  J'y suis. C'était bien ça. La peur, l'omniprésence vacillante. Cette chose a plusieurs formes, plusieurs noms différents. L'un d'entre eux : Manque. Je m'en souviens, maintenant ; seulement, c'est trop tard. Irréversible. Une absence, et ce monstre invisible se régalera de notre substance. Une coquille vide, et puis plus rien. Approche. On ne sait jamais.

-    Je veux. C’est doux. Chérie, ton absence s’appelle solitude. Quand tu t’en vas, c’est moi qui disparais. Et les autres. Et le reste. Et tout. Tu es le monde que tu emportes dans ta valise lorsque tu t’éloignes. C’est pour ça que j’ai peur. Comme un enfant jeté dans une chambre noire, comme un sol qui se dérobe sous les pieds d’un vieil homme. Comme une réalité qui s’infirme, qui s’éclipse et laisse place à la nébuleuse du mauvais rêve. C’est là qu’elle vit, cette chose. Le Manque y construit son empire. Comme une troublante dissonance dans la plus belle des harmonies. Je ne veux plus de ces mauvais musiciens dans notre orchestre. Ne pars pas, cette fois je t’emmène.



28 août 2007

Préface

Nouvelles d'eux.



* En gris : personnage d'Aurélie.

* En brun : personnage de Benoit.


Contacts :

Elle : shinoda_aurelie@yahoo.fr
Lui :
b.baudinat@hotmail.fr

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